Animal tropical
Agneta, une sage organisatrice de colloques littéraires en Suède, bombarde le narrateur de coups de téléphone, le presse de venir et se montre de plus en suggestive. Le romancier, pour sa part, est engagé jusqu’au cou dans une passion torride avec une voisine métisse, moitié sado-maso, moitié mac-pute, moitié amour fou. Il finit par décrocher son visa pour la Suède, ce qui nous vaut un livre dans le livre, le récit loufoquissime d’un Cubain dans la banlieue de Stockholm, d’un latin lover obsédé par le thermomètre sur le balcon, révulsé par le saumon froid et le thé à toute heure, décidé à initier sexuellement son amphitryonne et protectrice, dégoûté par les obsessions suicidaires et hygiénistes de l’Occident puritain, et qui finira par repartir à toutes jambes vers sa Gloria, sa putain mulâtresse, femme puissance cent, la vraie gloire. Deux portraits formidables de femmes, archétypiques certes (La Suédoise, La Cubaine) mais qui ne basculent jamais dans la caricature ou l’exotisme facile. Agneta et Gloria sont aussi horripilantes et sublimes l’une que l’autre, à leur manière, et Gutiérrez l’écrivain fait des étincelles dans les dialogues avec ces deux « nanas » si opposées et si femmes.