Paul-Loup Sulitzer
Kate
Rourke comprit qu’il venait de rejoindre l’Armée Rouge chinoise. Un homme sur dix tenait dressée une torche de pin. On pouvait presque imaginer que ce fantastique serpent lumineux faisait le tour de la planète. Il était dix heures du soir. Kate entendit un bruit au dehors. Sa main glissa vers le pistolet. Mais elle le lâcha aussitôt. Elle avait reconnu le pas de Rourke.
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Parvenu à l'heure des bilans, le narrateur, directeur d'hôpital, se souvient que, trente ans auparavant, on avait exhibé devant les étudiants, dans un amphithéâtre déjà vétuste, aujourd'hui disparu, sa mère, presque mourante, un écriteau sur la poitrine. Et d'autres souvenirs reviennent qui font affleurer quelques figures d'Argentins : Gabriel, le kinésithérapeute aveugle, Nicolas, le frère, et même Eva Perón, haranguant du haut d'un tracteur une foule de miséreux. Mais très vite, sur la scène de la mémoire, c'est l'extravagant M. Moralès qui s'impose. Ancien grand couturier, tour à tour avide d'absolu et succombant à l'abjection, il entraîne dans son sillage un cortège d'excentriques. Seul le souvenir de la mère, une femme aux yeux gris, pénétrée de la sagesse des humbles, revient apaiser le tumulte de la mémoire. Et les ombres, enfin, peuvent se dissiper.
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