Jean François Deniau
La bande à Suzanne
» Alors nous avons pris pour cible les uns ou les autres. Des bourges, des passants, des quidams inconnus. Toujours au hasard. Les tuer mais sans mobile. Surtout pas de mobile, de cause, de raison, disait Suzanne. Les causes et les raisons, ça fait prendre. Et c’est sale. Le hasard, c’est ça le jeu. Tiens, le premier qui rentre chez lui cette nuit, au numéro 29. Ou le premier qui passe sa porte pour en sortir au numéro 73 bis. Qui ? Veux pas le savoir. Pourquoi ? Ce serait dégoûtant. Tire donc, jeunot, et tu passeras mec. Elle ne le disait pas, Suzanne. Mais nous on croyait la comprendre sans qu’elle ait besoin de parler. Les mots, ça perd du temps. » Nous sommes aux assises, quelques années plus tard, en pleine audience. C’est Serge qui parle et raconte toute l’histoire. Il faisait partie de la bande à Suzanne. Parce qu’il aime toujours Suzanne, il n’a rien oublié : les codes, les rites, les règles et tous ces crimes jamais élucidés.