Pili pili : Histoire singuliere et edifiante du nègre kotakingue

En premier lieu initial, il y a moi, Jean de Dieu Kotakingué, élève moniteur à fines lunettes d’or de la mission de Bangassou qui connaît trop la science et la grammaire pour faire certificat avec l’élégance de la grande culotte à carreaux jaunes et violets, la veste zazou, la chemise des larges fleurs et le chapeau de Solutré aux ailes onbrageantes. Il y a aussi Kabossa, le caporal, très méchant avec la férocité permanente de la chicote répressive. Et puis madame Zozéfine, ménagère dissolue, qui boit sans retenue l’eau de feu de l’arigui élaborée par Samba ti Gnagou, homme clandestin de distillation. Simon Nzapa, leader indomptable de l’affranchissement de la négritude, répand les paroles enflammées tyrannicides libératoires à l’arrivée à Kemba du bateau de l’essence de monsieur Sansonnet, brutal colonialiste, époux de madame Marie, femme de distinction, objet inaccessible de mes rêves d’amour. Interviennent aussi beaucoup de blancs, ceux de l’administration, ceux qui font commerce, et ceux qui font libanais, grecs, ou portugais, et puis la foule des hommes et des femmes vernaculaires indigènes de couleurs qui aiment trop manger gloutonnement le manioc avec la sauce pili-pili et boire ensuite sans retenue l’arigui flammifère avec la bière Primus fraîche qui permet ensuite de faire « Brrroooh » de manière effrayante comme le lion en période des amours.