Boris Schreiber
Hors-les-murs
« J’avais vingt-deux ans au sortir de la guerre et je voulais vivre après la peur permanente et les scintillements ambigus de l’Occupation. Vivre comment ? Vivre pour moi n’avait qu’un sens : mes livres. Ces livres chargés d’exprimer les non-dits de mes mutismes traqués. Encore fallait-il les faire accepter. Encore fallait-il qu’une fois acceptés, ils soient lus. Des années durant, ils ne furent ni acceptés ni lus. C’est ce combat que je raconte. Si j’avais échappé aux bourreaux-massacreurs pendant la guerre, ce n’était pas pour périr sous les médiocres-massacreurs pendant la paix. Dur combat car les médiocres connaissent le secret de la durée. Ils inoculent à qui les gêne le venin suicidaire de la paix. Tant de fois j’ai traîné comme une épave. Mais au plus obscur de moi-même, je savais que le feu, inextinguible, finit par brûler ceux qui veulent l’éteindre. Et j’ai rejoint mon aujourd’hui. » – B.S.