Adrien Barrot
L’enseignement mis à mort
On n’a pas idée de ce que peut être aujourd’hui la sidérante solitude des professeurs.
Cette solitude n’a rien à voir avec celle qu’il appartient à l’institution de leur ménager et de leur garantir dans la pratique même de leur enseignement, afin d’en soutenir l’indépendance. Non, il s’agit là d’une chose d’un tout autre ordre, d’un abandon dont les professeurs eux-mêmes n’osent pas sonder les abîmes. ” Pourquoi l’enseignement est-il aujourd’hui privé de sa substance ? Pourquoi serait-il interdit de transmettre des connaissances ? Pourquoi est-il tout simplement devenu impossible de conduire ceux qui sont sur les bancs de l’école à penser par eux-mêmes ? Telles sont les questions que pose, avec perplexité, avec lucidité, avec amertume, Adrien Barrot. Ce plaidoyer, écrit dans l’urgence, dit le quotidien d’un métier bafoué et, surtout, appelle à un sursaut immédiat : parce qu’il faut que l’école existe, que les professeurs puissent redevenir des professeurs, et les élèves des élèves.
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Paul Claudel nous oblige. Le désir violent qui se déploie dans ses textes de théâtre nous invite à être constamment attentifs à ce qui en nous de faiblesse et de lassitude appelle à un dépassement frénétique de l’être vers la grandeur, comme une exigence d’humilité et d’orgueil devant l’existence. Quand l’ironie facile et la paresse de la critique veulent limiter notre joie et notre aspiration à un amour plein, Claudel nous oblige à renaître à la vitalité qui meut le corps et l’esprit des créatures, en opposant l’épreuve vraie de la souffrance à l’endormissement honteux des sens, partout loué.
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Il faut bien que quelqu’un monte sur le ring et dise: « Je suis fier d’être français. » Qu’il réponde à ceux qui condamnent la France pour ce qu’elle fut, ce qu’elle est, ce qu’elle sera: une criminelle devenue vieillerie décadente. Or nos princes, qui devraient la défendre, au lieu de pratiquer la boxe à la française, s’inspirent des lutteurs de sumo! Comment ne pas chanceler dans ces conditions? Et les procureurs de frapper fort. Ils exigent que la France reconnaisse qu’elle les opprime, qu’elle les torture, qu’elle les massacre. Seule coupable! Pas de héros dans ce pays! Renversons les statues, déchirons les légendes. Célébrons Trafalgar et Waterloo, et renions Austerlitz! Ils veulent que la France s’agenouille, baisse la tête, avoue, fasse repentance, reconnaisse ses crimes et, tondue, en robe de bure, se laisse couvrir d’insultes, de crachats, heureuse qu’on ne la « nique » qu’en chanson et qu’on ne la brûle que symboliquement chaque nuit! Il est temps de redresser la tête, de hausser la voix, de monter sur le ring… et de boxer à la française!
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