Antonio Muñoz Molina
Séfarade
Antonio Muñoz Molina a l’intime conviction que chacun de nous enferme en soi, comme un coffre à l’ouverture capricieuse, un ou plusieurs romans. Que la vie suit des méandres compliqués aux allures d’échecs, de catastrophes, de défaites grandioses et tristes comme des sanglots de géants. Son dernier livre se penche sur ces hommes et ces femmes dont la clarté de l’existence fut soudain masquée par les horreurs de la Seconde Guerre mondiale. Poursuivant et forçant de sa plume sa mémoire, et la mémoire de ceux qui lui offrirent ces histoires, Molina nous invite à suivre les accords d’un chant triste, évoluant entre fiction et réalité, récit historique et personnages de fiction. Il dessine, dans l’amour de son sujet, ces vies plongées dans l’oppression du nazisme ou du stalinisme, rédige les remords d’un enfant et de son père, rescapés de l’extermination, relate les destins de Franz Kafka ou de celle qui fut sa maîtresse, Milena Jesenska, l’épreuve de Margarete Buber-Neumann, qui fut prisonnière en Sibérie puis à Ravensbrück. Mais la grande force de Molina est de ne jamais profiter de ses personnages pour les transformer en acteurs de mélodrame.