Les lettres du Baron
N’est-ce pas le plus grand crime du baron Haussmann, ces centaines de lettres assassinées ? Ces enveloppes jaunies qui n’arriveront jamais à leurs destinataires sous prétexte que les souvenirs auxquels elles se rattachent sont enfouis sous les décombres des maisons jetées à bas par le plus vaste chantier qui ait jamais empoudré la capitale ? La mission d’Octave, postier parisien sous le Second Empire, n’est-elle pas de les aider à retrouver la paix ? Et quel est le destin des lettres sinon de donner des nouvelles ? Ainsi va la quête d’Octave qui commence par les plus excitantes, par les missives venues de l’étranger. Ainsi commence le voyage de celui qui, porté par le mystère d’une calligraphie, par un parfum, une couleur d’enveloppe, pose son imagination sur » La dame au papillon bleu « , belle aristocrate enlevée par un papillon qui orne sa chevelure et s’envole le soir du bal des Tuileries, ou sur le récit du » sac du palais d’Eté » qui met en scène des élèves pékinoises fouillant les cadavres des militaires français afin d’envoyer à leurs veuves de fausses lettres d’amour. Ainsi s’enhardit le postier lorsqu’il aborde des lettres autrement plus touchées par les travaux d’Haussmann. Voilà, voilà plus noires, plus aveuglantes encore, la cohorte des lettres du peuple parisien qui ne pardonne pas au Baron ses coups de pioche en plein coeur de la ville et ourdit contre lui les plus redoutables vengeances. Voilà au bout du périple, Duchon-Doris, un jeune homme au talent éclatant qui cintre l’Histoire au feu de son imagination.