La récolte douce des larmes
Un texte qui s’engage à dénoncer l’injustice doit-il être lu et apprécié selon des critères littéraires ? Si oui, La Récolte douce des larmes– conventionnel, sentimental, faussement poétique – est un roman à oublier. En revanche, si l’on considère ce qu’il dénonce, gardons-le précieusement. 1937. Saint-Domingue n’a plus besoin de ses immigrés haïtiens et décide de s’en débarrasser. Les massacres s’enchaînent alors, tous plus véridiques les uns que les autres puisque l’auteur a travaillé à partir de documents historiques.
La récolte douce des larmes
Amabelle Désir, une jeune Haïtienne, est au service de la Señora Valencia, une « Espagnole » dominicaine. L'une est noire, l'autre blanche. Elles ont été élevées ensemble, partageant chambre, jeux et secrets. Jusqu'à ce que Valencia épouse Pico Duarte, un officier de la garde de Rafael Trujillo, le terrible dictateur de Saint-Domingue. Alors, leur différence de couleur de peau et de classe est devenue réalité. Amabelle, depuis, se contente d'une paillasse où la rejoint, le plus souvent possible, Sébastien, un coupeur de canne à sucre häitien. Un matin d'août 1937, Valencia accouche de jumeaux, un garçon, Rafi, « la peau couleur de crème de coco », et une fille, Rosalinda, « la peau d'un bronze profond, à mi-chemin entre le brun des noix du Brésil et le salsifis noir ». Deux enfants à l'image de la dualité de l'île d'Hispaniola, partagée entre Haïti l'Africaine et Saint-Domingue l'Européenne. Terrible confrontation qui s'achèvera, cette année-là, par le massacre de 20 000 Haïtiens, coupeurs de canne et domestiques.