La passion de Joseph Pasquier
Le dernier volume de la Chronique des Pasquier a pour personnage central un homme hors série, Joseph Pasquier, que sa volonté de richesse et de puissance va mener à la catastrophe. Et pourtant, «rien n’est jamais fini dans notre monde misérable».
Civilisation
La guerre, c’est le déferlement stratégique des hommes et des armes sur tel ou tel point du front. Mais c’est aussi le reflux de ces hommes après la bataille, le retour de ceux qui ont pu revenir, un raz-de-marée en sens inverse qui laisse sous les toiles battantes des infirmeries de campagne « une mosaïque de souffrance teinte aux couleurs de la guerre, fange et sang, empuantie des odeurs de la guerre, sueur et pourriture, bruissante des cris, des lamentations, des hoquets qui sont la voix même et la musique de la guerre. » Alors aux blessés s’offre ce qui se fait de mieux dans le monde moderne, les draps frais, l’infirmerie « blanche comme une laiterie », les pinces brillantes du chirurgien, l’autoclave, le dernier cri du progrès. Mais qu’importe au lieutenant Dauche avec sa balle dans la tête, à Revaud et à leurs compagnons de misère, à ceux dont Georges Duhamel rappelle le courage simple, la bonne humeur, l’endurance? « La civilisation n’est pas dans toute cette pacotille terrible; et, si elle n’est pas dans le cœur de l’homme, eh bien! elle n’est nulle part. » C’est la leçon de ces pages qui font écho à la poignante Vie des martyrs où, une fois de plus, un témoin raconte les cruelles choses vues et vécues pendant la Grande Guerre.
Cécile parmi nous
« Insensible à tout sauf à la musique, Cécile Pasquier a tant travaillé qu'elle est devenue une pianiste de concert célèbre dans le monde entier. Puis, un jour, cette belle jeune femme sereine a épousé Richard Fauvet. De tout le clan des Pasquier, c'est son frère Laurent qui en a été le plus meurtri, le plus inquiet. Meurtri, car Cécile a repoussé depuis toujours son meilleur ami Justin; inquiet, car Fauvet, esprit brillant, créateur du Groupe du Portique, est le type même de l'intellectuel cynique et froid.
Le notaire du Havre
En 1889, la famille Pasquier (Raymond, Lucie et leurs quatre premiers enfants, Joseph, Ferdinand, Laurent et Cécile) tire le diable par la queue dans son petit appartement de la rue Vandamme, quartier Montparnasse à Paris. Raymond poursuit d’interminables et fort tardives études et Lucie fait des travaux de couture et s’occupe de ses enfants. Mais un jour, la famille apprend que Lucie pourrait bénéficier d’un héritage suite au décès de ses deux soeurs au Pérou. L’ennui c’est qu’elle n’en a encore que l’usufruit car le décès de l’une des soeurs n’est pas confirmé. L’argent est donc bloqué. La famille ne récupère que quelques meubles et vit dans l’attente de l’arrivée d’une lettre du « Notaire du Havre » leur annonçant enfin la bonne nouvelle… Mais elle tarde à venir et chaque jour la famille s’enfonce un peu plus dans la misère.
Le combat contre les ombres
L'année 1914 semble marquer pour Laurent Pasquier le début d'une période heureuse. Il a trente-trois ans, il exerce le métier qu'il aime, son poste de chef de recherches à l'Institut National de Biologie lui assure un revenu honnête. Ne serait-ce pas le moment de fonder un foyer? L'idée lui en est venue depuis qu'il connaît Jacqueline Bellec. Le temps de rassembler son courage pour faire sa demande, les perspectives changent : le directeur de l'L.N.B., Larminat, l'oblige à prendre comme garçon de laboratoire l'ineffable Hippolyte Birault. Laurent s'en accommoderait si ce rustre imbu de lui-même ne commettait des fautes graves qui imposent son renvoi, mais Larminat se dérobe, Bitault étant « protégé » par un ministre.
Les Maîtres
Afin de préparer sa thèse de médecine en même temps que celle de doctorat ès sciences, Laurent Pasquier, qui travaille dans le laboratoire du professeur Chalgrin, sollicite un poste de préparateur auprès d'une autre sommité de la biologie : le professeur Rohner. Le premier citant avec éloge les travaux du second, le choix de ces maîtres semble parfait. Laurent ne tardé pas à s'apercevoir qu'il s'est montré naïf la courtoisie des propos dissimulait une âpre rivalité que l'intervention démoniaque d'un camarade de Laurent fait éclaterr au grand jour. Rohner use des pires armes sans le moindre scrupule pour s'assurer la préséance.
Le jardin des bêtes sauvages
Tout en contournant le récif du Panthéon, je ruminais une question que je devais me poser mille et mille fois par la suite, une question que je sentais déjà familière à toutes mes fibres : « Allons! Qu'est-ce qu'il' y a encore? Qu'a-t-il encore inventé? » Oui, telle était la question qui, plus ou moins bien formulée, s'élevait du fond de mon coeur quand je voyais maman serrer les lèvres jusqu'à les vider de toute cou-leur, ou quand papa préludait en public à quelqu'une de ces colères théâtrales qui avaient fait, qui faisaient encore la terreur du clan.