Le Fils
Le onzième jour après ma mort, Papa est allé porter ma couette à la teinturerie. Monter la rue du Couédic, les bras chargés de ma literie, le nez dedans. Il se dit qu’il renifle mon odeur. En fait, ça pue, je ne les avais jamais fait laver ces draps ni cette couette. Ça ne le choque plus. Au contraire : subsiste encore quelque chose de moi dans les replis blancs qu’il porte à la teinturerie comme on porterait le saint sacrement. Papa pleure le nez dans le coton. Il profite. Il sniffe encore un coup la couette, et il pousse enfin la porte du magasin. Papa ne peut plus traîner. Condoléances, etc. Le teinturier – recondoléances, etc. – débarrasse papa de la couette. Papa aurait voulu que ça dure, une file d’attente, une livraison, une tempête, juste que ça dure le temps de respirer encore un peu plus des bribes de mon odeur. Papa se dépouille, il perd, il perd. Michel Rostain nous happe dans le récit d’un deuil impensable. Avec une infinie pudeur et une grande finesse, il nous entraîne dans les méandres d’un amour absolu, celui d’un père pour son fils.
Rire pour ne pas mourir
Avec mon frère et mes sœurs, quand par hasard on se rencontre, on se regarde les chaussures, on évite soigneusement de croiser les yeux de l’autre pour ne pas éclater en larmes, là, comme des cons, au coin de la rue. À quand remonte la dernière fois qu’on s’est pris dans les bras ? Je crois que c’était au cimetière, pour maman. Pour papa, déjà, on ne se touchait plus. Comme si se toucher, s’embrasser, c’était risquer de se remémorer combien on était heureux, tous les six, sous le même toit. Combien on s’aimait. Ce temps-là a été trop radicalement anéanti pour qu’on y retourne ». Longtemps, Jean-Marie Bigard a pensé qu’il ne survivrait pas aux blessures de son passé. Alors il n’a pas cessé de courir, du Point-virgule au Stade de France, en passant par l’Olympia et Bercy, devenant au fil de ses spectacles le premier clown de France.
Pour vivre debout
Lorsque Jean-Pierre Moreau apprend que les faiblesses dont souffrent parfois ses jambes sont les premiers symptômes d’une sclérose en plaques, le choc est terrible : cette maladie incurable mène inévitablement à la paralysie, puis à la mort. Pourtant, il prend une courageuse décision : refusant de reconnaître d’avance la victoire de la maladie, il part à la recherche d’alternatives médicales. Quoique bientôt cloué dans un fauteuil roulant, il se lance dans un tour du monde des techniques de guérison, des plus ancestrales aux plus novatrices.
Cinq personnes que vous avez croisées de votre vivant vous attendent là-haut. Leur sort est intimement lié au vôtre, et pourtant vous ne les connaissez pas forcément. Ces cinq rencontres, belles ou terribles, vous révéleront les fils invisibles qui nous relient tous les uns aux autres.
Déshonorée
Mukhtar Mai a 28 ans, elle vit dans un village de l’est du Pakistan. Son plus jeune frère, âgé de douze ans, aurait été vu avec une fille d’un autre clan. Le tribunal du village se réunit immédiatement. Pour la première fois au monde, un tribunal prononce cette terrifiante sentence : Mukhtar Mai est condamnée à être violée en réparation de la prétendue faute de son frère. La peine est exécutée. Violée, humiliée, déshonorée, elle aurait pu se suicider comme tant d’autres femmes. Au risque de sa vie elle a décidé de parler. Du fin fond du Pakistan sa voix va émouvoir le monde entier. Son appel est entendu et entraîne un immense élan de solidarité. Alors elle décide de construire une école. » C’est par l’éducation que nous pourrons faire reculer ces pratiques barbares « , répète-t-elle. Déshonorée est un témoignage bouleversant. Aujourd’hui Mukhtar Mai vit toujours dans son village, elle est devenue une icône pour tous ceux qui luttent, au Pakistan et dans le monde, contre toutes les violences faites aux femmes.