Mars
Sous le pseudonyme de Fritz Zorn se cache un jeune homme pressé. Jeune – il n’a que 32 ans – et pressé d’écrire car il se sait condamné par un cancer qui ne lui laissera aucune chance. Pour qui a vécu, la seule pensée d’une mort imminente fait jaillir le squelette branlant d’une angoisse incompressible et dévorante. Fritz Zorn est à peine révolté, il n’a jamais vécu. Produit d’une éducation pour laquelle l’impassibilité devant les réalités concrètes (donc vulgaires) du monde tient lieu d’obligation morale, Zorn a toujours été un « hors la vie ». Propre, sage et faisant honneur à sa famille, fleuron de la grande bourgeoisie zurichoise, il n’a jamais fait de vagues, s’est conformé, a emprunté docilement la voie qu’on lui avait tracé, a écouté la voix qui l’incitait à se méfier du monde extérieur et de ses vices.